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Sotériologie

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La sotériologie, du grec σωτηρία (sôtêria, salut) et λόγος (logos, discours, science), est l'étude des différentes doctrines religieuses du salut de l'âme. Les théories du salut occupent une place importante dans de nombreuses religions.

Mésopotamie

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En Mésopotamie, à partir du corpus littéraire de matériel archéologique de l'âge du bronze qui a survécu jusqu'à notre ère, nous savons que le monde de l'au-delà est perçu dans la vie quotidienne comme responsable des maux et des maladies. Plusieurs notions différentes interprètent le concept de la vie après la mort, mais globalement, les fantômes qui agacent les vivants sont considérés comme des défunts n'ayant pas pu recevoir une sépulture rituelle, soit comme d'anciens membres de la famille.

Égypte ancienne

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Les anciens Égyptiens avaient une conception métaphysique de l'origine de l'univers. Pour eux, l'univers est né de la rencontre de deux principes : le principe Matériel (Chaos) et le principe Spirituel (Dieu). L'être humain possède une constitution identique : la Matière (Corps) et l'Esprit (Conscience). À la mort, l'Esprit quittera l'enveloppe charnelle et poursuivra son chemin dans l'au-delà dans l'espoir d'y être divinisé. La mort est ainsi une renaissance dans le monde spirituel.

Certains documents historiques montrent que les Égyptiens croyaient en la réincarnation, chose relatée dans les écrits d'Hérodote. Néanmoins, des études récentes ont montré que les Égyptiens n'auraient pas fait mention du concept de réincarnation avant le IVe siècle av. J.-C., soit après l'introduction d'éléments grecs dans leur philosophie.

Le Livre des Morts (ou plus correctement « La parole pour sortir au jour ») est un papyrus qui relate le parcours de l'esprit du défunt, de sa dépouille terrestre à sa divinisation. Selon ce livre, l'esprit quitterait le corps du défunt et ressusciterait dans l'au-delà où il entreprendrait un périple périlleux, puis, avec Anubis, se rend au tribunal d'Osiris où il sera jugé. Pour franchir toutes ces étapes, les Égyptiens mettaient dans le tombeau du défunt momifié le Livre des Morts car se trouvent à l'intérieur plusieurs formules magiques permettant de franchir les obstacles.

Dans le Papyrus d'Ani est relaté un épisode important de la croyance égyptienne : la Pesée du cœur. Celle-ci prend la forme d'un procès au cours duquel la conscience est examinée afin de savoir si elle mérite ou pas de rejoindre le séjour des éternels. Le cœur est pesé par Maat, déesse de la Vérité et de l'Equilibre cosmique. Sur un des plateaux de la balance, Maat pose le cœur du défunt et sur l'autre la plume servant à écrire son nom. Thot note le jugement sur son registre. Si le cœur est plus léger que la plume de Maat, soit si la conscience n'est pas alourdie par le poids des péchés et de la culpabilité, elle sera envoyée dans le royaume des Purs, le Champs d'Ialou. Dans le cas contraire, elle sera avalée par la déesse Amut.

La croyance égyptienne semble avoir influencé la pensée grecque. En effet, dans le Gorgias, Platon décrit la mort comme un jugement de l'âme au cours duquel on évalue si le mort a mené une existence conforme au principe du Bien. Si l'âme a vécu dans l'injustice, elle sera châtiée dans l'Hades, si elle est saine, elle sera transférée dans le monde intelligible où elle sera divinisée.

Zoroastrisme

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D'après le livre Iran, une histoire de 4000 ans de Yves Bomati et Houchang Nahavandi[1], dans le zoroastrisme, l'Homme est libre de ses choix et est un acteur essentiel pour le triomphe de la cause juste. Il doit jouer un rôle actif dans les desseins de la divinité Ahura Mazda et doit s'appuyer sur les énergies supérieures des Amesha Spenta pour accéder à la Bonne Pensée, la Bonne Parole et la Bonne Action. Il est partie prenante dans la lutte incessante entre le principe de Vie (le bien, l'intelligence, la lumière) et le principe de Non-vie (le mal, l'obscurantisme, les ténèbres). S'il est libre de choisir entre ces 2 principes, il doit aussi en assumer les conséquences. S'il suit le rite développé par le prophète Zoroastre consigné dans les hymnes à Dieu, les Gathas, permettant de participer à l'agencement du monde et à sa conservation alors la vie l'emportera définitivement sur la non-vie et le Dieu unique Ahura Mazda régnera partout sur la Terre. Ce passage nécessitera une apocalypse par le feu qui conduira enfin à la restauration de l'âge d'or, à une régénération du monde et à l'avènement du Royaume de Dieu.

Après la mort, les Justes comme les Méchants voient leurs âmes triées et jugées par Ahura Mazda à l'entrée du "Passage du Trieur". Les Justes gagneront le paradis appelé la "Maison des Chants", "l'Empire de la bonne pensée" ou encore "l'Empire des Prospérités". Quant aux Méchants, ils resteront dans un espace de désolation, sorte de purgatoire, avant l'ordalie finale par le feu qui réconciliera toutes les âmes.

En synthèse, l'Homme doit respecter l'agencement du monde, observer un rituel propre à le garantir tout en étant responsable de ses choix pour être parmi les Justes.

Philosophie grecque

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Platon a développé, en particulier dans son Timée (86 b - 90 d) une doctrine eschatologique et sotériologique de la connaissance, inspirée de la doctrine pythagoricienne de la métempsychose[2],[3].

Pour les juifs, la vie après la mort est une expression de la relation envers Dieu et la spiritualité que nous avons forgée et développée dans ce monde-ci. L’expérience qu’un être fait de la vie future est totalement dépendante de sa préparation préalable. Chaque choix que nous effectuons dans ce monde-ci façonne notre personnalité et génère un rapprochement ou un détachement avec le monde futur.

Imaginez deux personnes assistant à un concert philharmonique. Le premier a appris le solfège, s’est documenté au sujet du compositeur et est très versé dans toutes les nuances impliquées dans la création de cette symphonie. Pour lui, le concert est une expérience riche et extrêmement satisfaisante. Son compagnon, lui, a été traîné malgré lui et il déteste la musique classique. Pour lui, ce concert est ennuyeux voire pénible.

Un seul concert, deux types d’expériences très différentes.

Notre essence ne subit pas de véritable transformation quand nous quittons ce monde. C’est exactement le contraire. Notre essence est libre de s’exprimer pleinement dans le monde futur. La douleur du détachement et la conscience accrue de ce que nous aurions pu devenir si nous avions fait des choix de vie plus judicieux représentent la vision juive de l’enfer.

Les druides étaient une corporation de prêtres qui était commune aux différents peuples celtiques de la Gaule (qui comprenait une partie importante de l'actuelle Grande-Bretagne et du Benelux). On pense que leur philosophie et leur religion étaient proches des pythagoriciens. Ils croyaient comme les anciens peuples germains et nordiques à l'immortalité de l'âme et à sa migration après la mort dans un paradis ou un enfer selon les mérites de chacun.

Christianisme

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Cette « théologie du salut » est indissociable du mystère de la rédemption, et par conséquent a partie liée avec les notions de péché et de grâce. De nombreux débats opposent les doctrines catholique et protestante, en particulier sur les concepts de justification et de prédestination. Cela crée des divisions à l'intérieur même des confessions. Dans la théologie catholique, la question du « salut universel » n'est pas tranchée définitivement et fait toujours débat. Les protestants, pour leur part, sont divisés en plusieurs courants, chacun interprétant l'Écriture avec sa propre sensibilité ; la question du salut ne fait pas exception et aucun consensus n'a été trouvé.

Dans la théologie catholique, la sotériologie est liée à la doctrine du péché originel[4].

Depuis la fin du XXe siècle[réf. nécessaire], la sotériologie est l'un des champs d'étude de la christologie.

Dans le Coran, le livre sacré en islam, le Salut est fondamentalement conditionné par deux principes : croire en Dieu et faire des actes vertueux/sâlihât (S2.V82; S3.V57; S5.V9;...). Fidèle à la Volonté divine d'avoir une pluralité de communauté religieuse, le Salut est accessible à toute personne monothéiste quelle que soit sa voie générale ("Shir'a" qui peut traduire la Loi mais aussi la conception générale de Dieu) et sa voie spécifique ("Minhâj" qui peut traduire le culte, le rite, la loi ou de façon générale tout ce qui est lié à la pratique), l'objectif étant de rivaliser en bonnes œuvres tel que défini dans la S5.V48. Est attribuée aussi à chaque communauté religieuse selon S22 V67, une forme de piété (Mansak). Toujours selon le Coran, l'accès au Paradis ne dépend ni des désirs des musulmans ni de ceux des Gens du Livre selon S4 V122-124.

L'herméneutique musulmane s'est tout de même emparée de la conception exclusiviste du Salut (déjà présente dans le Judaïsme et le Christianisme) en considérant que seuls ceux adhérant à l'Islam peuvent y accéder. Toutefois, cet exclusivisme fut dépassé par les Ahl Al Kashf (les gens du Dévoilement partisans de l'idée que la vraie Connaissance ne se fait que via l'Intellect grâce à un rapprochement avec Dieu) comme Ghazali, Ibn Arabi, Junayd,... .

L'au-delà est composé d'un Paradis et d'un Enfer. Les ressuscités sont classifiés en 3 catégories : les rapprochés de Dieu, les gens de la Droite et les gens de la Gauche.

La doctrine du Salut islamique diffère donc fondamentalement de la doctrine du Salut chrétien de par l'absence de l'effacement des péchés par la croyance en la Crucifixion-Résurrection-Ascension du Messie Jésus (1 Corinthien 17) qui doit mener à l'abolition du péché par la suppression de la Loi.

Dans le bouddhisme tibétain, la récitation à voix haute du texte sacré nommé Bardo Thödol, traditionnellement faite par le Lama pour une personne mourante ou récemment morte, permet à cette dernière d'entrer dans le Bardo. Le Bardo se réfère à un état intermédiaire après la mort et avant la réincarnation. Il pourrait s'apparenter à un type de purgatoire. C'est un état de transformation qui se passe en réalité en esprit et non physiquement.

Le mort, appelé l'Être Bardo, va naître dans ce Bardo comme un être mental dans la forme qu'il prendra dans la prochaine incarnation.

Étymologiquement, Bardo se décompose en Bar, dénotant le mouvement, et Do, signifiant île. De ce fait, Bardo est une île pour l'esprit se déplaçant de la mort à la prochaine étape de l'être physique.

L'objectif final dans le Bardo est de libérer l'être du samsara (cycle de la mort et de la vie).

La conscience du mort est en quelque sorte présente dans le corps et peut entendre le texte récité par le Lama qui le guide à travers les expériences déroutantes du Bardo. En effet, les êtres dans le Bardo possèdent leurs propres karma, évoquant toutes sortes de vision, dont certaines peuvent être terrifiantes. Le Lama lisant le texte aide l'être à reconnaître ce qu'il voit durant son séjour dans cet état intermédiaire et donc à la guider.

Il y a en tout 6 bardos (donc 6 états intermédiaires) dans le Bardo Thödol :

  • 1. Bardo de cette vie
  • 2. Bardo du rêve
  • 3. Bardo de la méditation
  • 4. Bardo de la mort
  • 5. Bardo de la réalité
  • 6. Bardo de la renaissance

Culte à mystères

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Mouvement syncrétique entre religions traditionnelles chinoises et christianisme, la Société des adorateurs de Dieu professe une notion de salut opposé au Culte impérial du Huángdì (皇帝), l'empereur chinois. La littérature et le mouvement taiping promet le salut par le renoncement dans l'idolâtrie des "faux dieux" du Taoïsme et du bouddhisme[5]. Ils considèrent que le pouvoir impérial chinois depuis Qin Shi Huang trompe le peuple, l'éloignant du vrai dieu chrétien, associé par Hong Xiuquan au concept de Shang Di (上帝)[6].

Notes et références

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  1. Yves Bomati et Houchang Nahavandi, Iran, une histoire de 4000 ans, Paris, Perrin, (ISBN 978-2-262-07597-2), p.35-40
  2. Lucia Saudelli, « Les maladies de l’âme : Quelques problèmes dans le Timée de Platon », Mnemosyne,‎ , p. 1-20 (lire en ligne)
  3. Paul Kucharski, « Eschatologie et connaissance dans le Timée », Archives de Philosophie, vol. 29, no 1,‎ , p. 5–36 (lire en ligne)
  4. R. Silouane Ponga, Cours de sotériologie
  5. (en) Carl S. Kilcourse, Taiping Theology. The Localization of Christianity in Chine, 1843-64, Washington, Palgrave Macmillan, coll. « Christianities of the World », , 295 p. (ISBN 978-1-137-54314-1), p. 58 p. 59
  6. Carl S. Kilcourse, Taiping theology: the localization of Christianity in China, 1843-64, Palgrave Macmillan, coll. « Christianities of the world », (ISBN 978-1-137-54314-1)

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Articles connexes

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Auteurs classiques
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Auteurs contemporains
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