Léo Cohn
Léo Jehuda[1] Cohn (dit Léo Cohn), né le à Lübeck[2], (ville libre de Lübeck), en Empire allemand, et mort le en Allemagne, est un des grands leaders des Éclaireurs israélites de France. En 1939, il s'engage dans la Légion étrangère. Durant l'Occupation, il s'occupe de l'instruction religieuse et le sauvetage d'enfants juifs. Il est déporté par le convoi No. 77 du de Drancy à Auschwitz. Il est ensuite déporté au camp d’Echterdingen, dans le Land du Bade-Wurtemberg, en Allemagne. Il meurt d’épuisement le 28 décembre 1944, à l'âge de 31 ans.
Biographie
[modifier | modifier le code]Léo Cohn[3],[4]est né le à Lübeck (Schleswig-Holstein) en Allemagne. Son père est Wilhelm Zev Cohn né en 1883 à Bzenec (Bisenz) en Moravie et mort en 1980 à Tel Aviv en Israël[5]. Sa mère, Miriam Carlebach, née le 15 juillet 1888, est morte en 1962[6], descend de la famille rabbinique Carlebach[7]. Elle est la sœur d'Alexander Carlebach (1872-1925), du rabbin Emmanuel Carlebach (1874-1927, Simson Carlebach (1875-1942), Bella Carlebach (1876-1960), du rabbin Ephraim Carlebach (1879-1936), Sarah Carlebach (1880-1928), Moses Carlebach (1881-1939), du rabbin Joseph Carlebach (1883-1942), Cilly Carlebach (1884-1968), David Carlebach (1885-1913) et du rabbin Hartwig Naftali Carlebach(1889-1967). Le rabbin Shlomo Carlebach (1925-1994), auteur, compositeur et interprète, est son neveu.
Léo Cohn a trois frères : deux plus âgés, Haim (Hermann) Cohen né le 11 mars 1911 à Lübeck, (Schleswig-Holstein), Allemagne et mort le 10 avril 2002 à Jérusalem, Israël[8] et Alexander Cohn (Cohen), né le 2 octobre 1912 à Lübeck, (Schleswig-Holstein), Allemagne et mort le 13 juillet 2004 en Israël[9] et un plus jeune, Shlomo Cohen Abarbanel, né le à Hambourg en Allemagne et mort le 4 juillet 1984 à Jérusalem en Israël[10].
En 1935, les parents de Léo Cohn, Wilhelm Zev Cohn et Miriam Cohn, émigrent en Palestine mandataire avec son jeune frère Shlomo Cohen Abarbanel[11].
Le 11 février[11] 1936, Léo Cohn épouse Rachel Schloss, née le à Hambourg, en Allemagne[12],[13],[14]. Léo Cohn a vingt-trois ans et Rachel Schloss vingt ans. Ils se sont rencontrés à l’école de Hambourg. Rachel Schloss a pris la direction du mouvement de jeunesse ESRA à la suite de Léo Cohn en septembre 1930[11]. Le mariage est célébré par un des oncles maternels de Léo Cohn, le rabbin Ephraim Carlebach, le rabbin de Leipzig. Robert Gamzon est présent. Le fondateur de l'l’école Maïmonide (Boulogne-Billancourt), le linguiste Marcus Cohn organise une des fêtes du mariage (Sheva Berakhot) à l'école[11]. Il est à noter qu'après la disparition de Léo Cohn dans la Shoah, Marcus Cohn épouse sa veuve!
Léo Cohn et Rachel Cohn ont 3 enfants : Noemi Cassuto (née à Strasbourg, le [11] ou le , un fils : Ariel, né le 17 août 1940 à Moissac[11], et une seconde fille : Aviva (épouse Geva) (née le 2 mars 1944, à Castres)[15],[2],[11].
Devenue veuve, Rachel Cohn épouse Marcus Cohn. Marcus et Rachel Cohn ont une fille, Ruthy, qui vit à Kfar Etzion[16].
Hambourg
[modifier | modifier le code]En 1919, la famille Cohn s’installe à Hambourg. De 1920 à septembre 1930, Léo Cohn étudie au lycée Talmud Torah (Realschule, équivalent au Lycée en France)[11].
Il interrompt alors ses études, deux ans avant l’Abitur, pour s’occuper des affaires de son père. Il arrête l’école à la 11ème classe, deux ans avant l’Abitur, qui correspond au baccalauréat en France. Il suit des cours de musique, de Français, d'Anglais et de sténographie[11].
Paris
[modifier | modifier le code]Léo Cohn immigre à Paris le [11] ou le [1]. Il présente un passeport délivré à Francfort-sur-le-Main, le [11].
Il s'installe chez ses parents qui habitent alors au 6 Avenue Saint-Philibert (aujourd'hui Rue Alfred-Bruneau dans le 16e arrondissement de Paris[11].
Le , il fait une demande de régularisation au ministère du travail –en vue d’obtenir une carte de travail en tant que réfugié allemand. Il mentionne qu'il travailler comme manutentionnaire à la Compagnie d’Exportation et d’Échanges commerciaux, 23 boulevard Haussmann dans le 9e arrondissement de Paris, i.e., la Compagnie fondée par son père[11].
Il s'implique immédiatement dans l'organisation des Éclaireurs israélites de France (EIF). Il devient le leader spirituel du mouvement. Il enseigne l'hébreu et fonde la Chorale[2].
En 1935, les parents de Léo Cohn émigrent en Palestine mandataire, avec son jeune frère Shlomo Cohn (plus tard connu comme Shlomo Cohen Abarbanel[11].
En janvier 1936, Léo Cohn devient professeur d’hébreu et de chant à l’école Maïmonide (Boulogne-Billancourt)[11].
Le 11 février[11] 1936, Léo Cohn épouse Rachel Schloss à Paris.
Le 15 juin 1937, Léo Cohn postule pour un poste de professeur de Français, chant et hébreu à l’Alliance Israélite Universelle. La demande reste sans suite. Il espère rejoindre sa famille en Palestine mandataire[11].
Strasbourg
[modifier | modifier le code]En janvier 1938, Frédéric-Shimon Hammel, président du Comité de Coordination de la Jeunesse au sein des EIF, vient à Strasbourg pour appuyer la candidature de Léo Cohn en tant qu’éducateur des jeunes. Le Consistoire s'oppose à cette nomination, car le poste « ne peut être confié à un étranger […] mais à un éducateur parfaitement en règle avec les lois du pays ». De fait, Léo Cohn est engagé. En mai 1938, Léo Cohn et Rachel Cohn s'installent à Strasbourg. Rachel renouvèle sa carte d’identité pour étranger le 23 mai 1938. Elle la reçoit le 24 juin 1938[11].
Le 20 septembre 1938, Léo Cohn écrit au préfet du Bas-Rhin, déclarant qu’il est prêt à s’engager dans l’armée française si une mobilisation générale a lieu[11].
Noémi Cohn naît à la clinique Adassa[17] le 27 octobre 1938. Les époux Cohn habitent 2 place de Zürich[11].
En novembre 1938, Léo Cohn fait une première demande de naturalisation à Strasbourg[11].
Seconde Guerre mondiale
[modifier | modifier le code]Le 2 septembre 1939, le gouvernement français fait évacuer de la ville de Strasbourg vers Périgueux (Dordogne), Brantôme (Dordogne), Hautefort (Dordogne)[11].
N’ayant pas l’autorisation de se rendre à Périgueux, Léo Cohn, Rachel Cohn et leur fille Noémi Cohn s’installent à Gérardmer (Vosges) où se trouve un centre de jeunes E.I.F.[11].
Légion étrangère
[modifier | modifier le code]Pour éviter l’internement et quitter la région, Léo Cohn rejoint la Légion étrangère. Il est incorporé le 26 décembre 1939, pour la durée de la guerre (recrutement à l’intendance militaire d’Épinal). Il intègre le premier régiment Étranger d’Infanterie. Il est envoyé en Algérie à Sidi Bel-Abbès où il arrive le 31 janvier 1940[11].
Moissac
[modifier | modifier le code]En août 1940, Rachel Cohn quitte Saint-Céré (Lot) pour Moissac (Tarn-et-Garonne) , où elle accouche de Ariel Cohn le 7 août 1940[11].
Après l'Armistice du 22 juin 1940, Léo Cohn n'est pas démobilisé. Il rentre de la Légion en décembre 1940. Il rejoint sa famille à Moissac puis le 22 janvier 1941, Léo Cohn et Rachel Cohn s’installent dans une ferme à Lautrec (Tarn), à une quinzaine de kilomètres de Castres(Tarn)[11].
Le , Léo Cohn reçoit une carte d’identité pour étranger délivrée à Lautrec et valable jusqu’au 9 mars 1942[11].
Du au , la chorale du chantier rural de Lautrec dirigée par Léo Cohn part en tournée, le donnant un récital à la Grande synagogue de Marseille[11].
En 1942, Léo Cohn visite les différents centres des E.I., surtout durant l’été[11].
Le , Robert Gamzon apprend à Vichy qu’une rafle va avoir lieu en zone Sud. Le , il réunit les chefs des E.I. à Moissac. Ils établissent les bases du futur mouvement clandestin : la Sixième[11].
En 1943, le danger grandissant, l’équipe nationale des E.I. disperse ses centres : maisons d’enfants et centres ruraux. Léo Cohn, Rachel Cohn et leurs enfants, Noémi Cohn et Ariel Cohn, s’installent dans une petite maison dans la commune de Labessonnié, au lieu dit La Caroussinière, à 4 Km du village de Lautrec. Ils prennent le nom de Colin[11].
Le , un avis de recherche est lancé par la préfecture de police du Tarn, Léo Cohn ayant quitté sans autorisation la commune où il est assigné à résidence, pour « être dirigé sous bonne escorte au camp de Noé par Muret »[11] (Haute-Garonne).
Le Aviva Cohn naît à Castres, rue de la Tolosane, sous le nom d’Yvette Colin[11].
Le , Léo Cohn conduit Rachel Cohn et ses trois enfants à la frontière suisse près d’Annemasse. Le passage de la frontière est retardé d’une journée car Léo Cohn et Ariel Cohn ont prié le matin, ce qui a pris du temps et la famille a raté le train pour Annemasse. De fait, Cette prière leur sauve leur vie car le train a été contrôlé et tous les Juifs arrêtés. Marianne Cohn leur fait traverser la frontière[11].
Arrestation et déportation
[modifier | modifier le code]Léo Cohn reste en France. Le , il est arrêté, à la Gare de Saint-Cyprien (et non pas à la Gare de Toulouse-Saint-Cyprien-Arènes qui avait été bombardée)[18] avec Jacques Roitman (dit Jacques Morel[19], [20]), Hermann-Hubert Pachtmann et trois autres résistants. Léo devait amener en Espagne des jeunes, il est arrêté au moment où il s’apprête à monter dans le train. Il avale la feuille sur laquelle sont inscrits les noms des jeunes[11],[21]. Hermann Pachtmann (27 ans) est né le 9 mai 1917 à Leipzig (Saxe), (Allemagne). Il est déporté par le Convoi No. 76, en date du 30 juin 1944, de Drancy vers Auschwitz[22]. Jacques Roitman (1922-1988)[23] est déporté à Buchenwald et survit à la Shoah[18]. Il est le frère du rabbin Paul Roitman[24] et de Léon Roitman (1925-1993)[23],[25],[26],[27], l’un des héros de la Résistance juive.
Abraham Block est témoin de l'arrestation. Il conduit les jeunes en Espagne, puis en octobre 1944 en Palestine mandataire[11].
Léo Cohn est interné à Compiègne[11]en tant que résistant. Il est transféré à Drancy le 6 juillet 1944[1] Il est enregistré avec le numéro 24895[11].
Il parvient à envoyer clandestinement des lettres de Drancy. Il travaille d'abord dans la serrurerie du camp puis cesse pour s'occuper des enfants[11].
Du 21 juillet 1944 au 25 juillet 1944, les allemands organisent des rafles dans les maisons de l’UGIF en région parisienne, arrêtant 250 enfants et 33 membres du personnel.Ils sont déportés de Drancy, par le Convoi No. 77, en date du vers Auschwitz[11]. Léo Cohn fait partie de ce Convoi et apporte son soutien moral et des encouragements par le chant[11].
Le dimanche 30 juillet 1944 correspond dans le calendrier juif au 10 Av mais est considéré comme le 9 Av reporté Tisha Beav (5704) (à part Yom Kippour le jeûne n'est pas autorisé le Chabbat). Il commémore la chute du premier Temple de Jérusalem et destruction du second Temple de Jérusalem. Il jeûne jusqu'à 16 heures, car il sait que cette nuit il part. La veille, au soir, il lit le Livre des Lamentations avec deux garçons et quatre filles[11].
D'Auschwitz, il sera déporté au camp d’Echterdingen, dans le Land du Bade-Wurtemberg, en Allemagne. Il meurt d’épuisement le 28 décembre 1944, à l'âge de 31 ans[11],[16].
Hommage
[modifier | modifier le code]- Groupe Léo-Cohn des Éclaireuses et éclaireurs israélites de France[28]
- Oratoire Léo Cohn, Grande synagogue de la Paix à Strasbourg
Pour approfondir
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- (en) Daniel Lee. Pétain’s Jewish Children: French Jewish Youth and the Vichy Regime. A thesis submitted to the University of Oxford in fulfilment of the requirements for the degree of Doctor of Philosophy. Trinity Term, 2011
- Serge Klarsfeld. Le Mémorial de la déportation des Juifs de France. Beate et Serge Klarsfeld: Paris, 1978. Nouvelle édition, mise à jour, avec une liste alphabétique des noms. FFDJF (Fils et filles de déportés juifs de France), 2012
Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Marcus Cohn
- Éclaireuses et éclaireurs israélites de France
- Résistance juive en France
- David Feuerwerker
Liens externes
[modifier | modifier le code]- Laëtitia Giannechini, Autour de Léo Cohn, mort à Auschwitz. lavie.fr, 28/02/2019]
- Leo Cohn. shum.cc.huji.ac.il.
- Oral history interview with Denise Gamzon. collections.ushmm.org. Témoignage en français.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (en) Leo Jehuda Cohn. geni.com.
- (en) « Last letters from the Holocaust: 1944. Léo Cohn », sur Yad Vashem.
- (en) Close-up portrait of Leo Cohn carrying a blanket and wearing his Eclaireur Israelite uniform.ushmm.org.
- Cohn Léo. memoresist.org.
- (en) Wilhelm Zev Cohn Family Tree.
- (en) Miriam Carlebach Family Tree.
- Modèle:Oubrage.
- (en) Haim (Hermann) Cohen. geni.com.
- (en) « Alexander Cohn (Cohen) », sur geni.com (consulté le ).
- (en) Shlomo Cohen Abarbanel (Cohen). geni.com.
- Léo COHN. convoi77.org.
- Voir (en) Leo Cohn (father of the donor) teaches a young boy to play the flute. United States Holocaust Memorial Museum.
- Voir Frédéric Shimon Hammel. Léo Cohn 1915-1945. Extrait de Souviens-toi d'Amalec. et en particulier son portrait de Rachel.
- Voir Joseph Weill, Le combat d'un juste: essai autobiographique (Gens d'Ici), Editions Cheminements, (ISBN 9782914474603, lire en ligne), p. 547-548.
- Voir (en) Studio portrait of Rachel Cohn and her three children, Noemi, Ariel and Aviva, upon their arrival in Palestine in 1945. United States Holocaust Memorial Museum.
- Voir Michel Lévy. Précisions au sujet du décès de Léo Cohn. judaisme.sdv.fr.
- Docteur Gérard Weindling. LA CLINIQUE ADASSA - son histoire. judaisme.sdv.fr.
- Interview No. (1)34 - Roitman, Jacques (רויטמן, ג'ק). youtube.com.
- Cohn Léo. memoresist.org.
- LES JUIFS DANS LA RESISTANCE La part des étrangers et l’exemple de Toulouse. resistancejuive.org.
- COHN, Léo, 30 ans. eeif.org.
- Voir, Klarsfeld, 2012.
- (en) Sixteen Jewish Rescuers to be Honored With the Jewish Rescuers Citation. bnaibrith.org. Jerusalem. June 23, 2020.
- Le Brith Hanoar Hamizra'hi (1935-1945) (suite et fin). judaisme.sdv.fr. avec une photo de Paul Roitman avec Jacques Roitman. Ce texte montre le rôle de Léo Cohn dans le judaïsme français.
- Photos de Sabine Einhorn et de son fiancé, Léon Roitman, membres de l'Armée juive (A.J.).
- (en) A young Jewish couple who is active in the French Jewish resistance pose immediately after liberation. collections.ushmm.org.
- (en) Two leaders of the Zionist underground, Mouvement de la Jeuness Sioniste, walk down a street in Grenoble. ushmm.org. Photos d'Otto Giniewski, leader du G'doud à Grenoble, avec Léon Roitman.
- Centre Léo Cohn-Anciens Éclaireurs Israélites de France. frankfor.bizhat.com.
- Victime de la Shoah en France
- Camp de Drancy
- Déporté résistant
- Déporté au camp d'Auschwitz
- Judaïsme orthodoxe
- Hassidisme en France
- Personnalité française du judaïsme
- Personnalité liée au scoutisme en France
- Résistant français
- Sionisme religieux
- Famille Carlebach
- Professeur de chant
- Naissance en octobre 1913
- Naissance à Lübeck
- Naissance dans la ville libre de Lübeck
- Décès en décembre 1944
- Décès en Allemagne
- Décès à 31 ans
- Victime française de la Shoah