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Élie Cohen-Hadria

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Élie Cohen-Hadria
Carte de presse d'Élie Cohen-Hadria, avec sa photo, sa signature et le logo de son journal Tunis socialiste (1933).
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Parti politique

Élie Cohen-Hadria, né le à Tunis et mort en août 1987 à Paris, est un médecin et militant socialiste franco-tunisien ayant joué un rôle important dans la marche à l'indépendance de la Tunisie.

Né dans une famille juive tunisienne modeste de langue judéo-arabe, il suit une scolarité primaire et secondaire française à Tunis, ce qui constitue le point de départ de son attachement à la France, puis des études de médecine à Lyon.

Choix du socialisme et de l'anticolonialisme

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Il acquiert la nationalité française pendant ses années d'études, rentre à Tunis en 1923 et, après un bref passage par la franc-maçonnerie[1], adhère en 1925 à la Fédération de Tunisie du Parti socialiste SFIO (Section française de l'Internationale ouvrière), où il occupe à plusieurs reprises (1927-1938, 1948, 1950-1956)[2] la fonction de secrétaire général. Il est également éditorialiste à Tunis socialiste (quotidien ou hebdomadaire selon les années) tout au long de l'existence du journal, c'est-à-dire jusqu'en 1956.

Son attachement aux Lumières et aux droits de l'homme, acquis à l'école française, le porte à s'intéresser d'emblée au sort des colonisés et à leurs droits. Dans les années 1920, la Fédération de Tunisie n'a avec les instances centrales du parti que des relations assez lointaines[3]. Il s'emploie à les resserrer, convaincu que le combat pour la reconnaissance des droits des Tunisiens, comme des travailleurs français de Tunisie, passe nécessairement par la France, et qu'il faut donc intéresser le parti à la question tunisienne si l'on veut des changements. Il rend compte régulièrement de la situation tunisienne aux congrès nationaux de la SFIO et convainc des députés socialistes de venir à Tunis pour mieux connaître la situation. Lorsqu'en 1934-1935 Tunis socialiste est suspendu et que quatre de ses rédacteurs (Cohen-Hadria, Serge Moati, Yves Faivre et André Duran-Angliviel) sont poursuivis par le résident général de France, Marcel Peyrouton, la SFIO envoie un avocat pour les défendre au procès : Vincent Auriol, futur président de la République française.

À cette étape, ni Cohen-Hadria, ni sa fédération, ni son parti n'envisagent toutefois l'idée d'indépendance, malgré de bonnes relations avec la nouvelle génération de militants nationalistes tunisiens, notamment Habib Bourguiba[4].

Seconde Guerre mondiale

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À la déclaration de guerre, il est mobilisé dans un hôpital militaire à Thibar, dans l'intérieur du pays. Démobilisé à l'été 1940, il rentre à Tunis, où toute activité politique ouverte est devenue impossible, surtout à partir de la loi d' portant statut des Juifs (signée notamment par l'ancien résident général Peyrouton, devenu entretemps ministre de l'Intérieur de Vichy). En , le Conseil de l'Ordre des médecins l'informe qu'il devra limiter sa clientèle aux seuls patients juifs dans un délai de deux mois[5]. Mais, dès novembre, l'arrivée des Allemands l'oblige à se cacher pour échapper à la police pétainiste[6] et aux fascistes italiens. En compagnie de son épouse, il reste caché, avec l'aide de ses camarades de parti, jusqu'à l'arrivée des Alliés en . Il s'engage alors dans les Forces françaises libres, est d'abord envoyé quelques mois au Levant, puis rejoint Alger, où il entre, pour quelques mois également, au cabinet civil d'André Le Troquer, commissaire à la Guerre et à l'Air du gouvernement de Charles de Gaulle. Il participe ensuite, comme médecin militaire, au débarquement allié en Provence et à la progression des armées alliées jusqu'en Allemagne en 1944-1945[7].

Vers l'indépendance de la Tunisie

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À son retour en Tunisie en , il s'emploie à reprendre l'activité du parti dans une atmosphère totalement changée, mais en suivant pourtant la ligne qu'il s'était tracée avant guerre : intéresser ses camarades du parti en France à la situation en Tunisie, tout en conservant des liens étroits avec les militants tunisiens. Progressivement, la situation en Tunisie ne cesse de se dégrader et de se tendre et, à partir de la fin des années 1940, il en vient à juger qu'il faut maintenant « prononcer le mot d'indépendance »[8],[9]. En , à l'arrivée de Pierre Mendès France au pouvoir, il demande à Alain Savary d'intervenir auprès de lui pour lui exposer l'urgence d'une action décisive[10]. Mendès France se rend à Tunis le pour proposer aux Tunisiens, en tant que président du Conseil, l'autonomie interne, début du processus d'indépendance.

Après l'indépendance de la Tunisie obtenue en 1956, Élie Cohen-Hadria quitte l'action politique proprement dite. Il se sépare de la SFIO en 1958 lorsqu'elle approuve le retour au pouvoir de De Gaulle à la suite du coup d'État du 13 mai.

À nouveau dans la société juive

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L'indépendance est suivie du départ de Tunisie d'un très grand nombre de Juifs. À partir des années 1960 et jusqu'à son propre départ pour la France en 1974, Élie Cohen-Hadria s'investit alors dans l'aide à ceux qui restent, pour la plupart trop vieux, trop pauvres ou trop isolés pour pouvoir partir. Il dirige les services de santé de l'Œuvre de secours aux enfants et participe au maintien de l'école professionnelle de l'Organisation reconstruction travail, refermant ainsi la boucle en revenant dans le milieu de son enfance, et complétant pleinement sa triple identité[11].

Bilan et écrits

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S'affirmant à la fois Juif, Tunisien et Français sans éprouver le besoin de choisir entre les trois (et ajoutant à ce propos : « C'est dans le socialisme que j'ai finalement trouvé le point d'appui qui m'était nécessaire pour réaliser pleinement mon équilibre »)[12], Élie Cohen-Hadria a, par son action politique et journalistique, activement contribué à la décolonisation peu violente de la Tunisie[13].

Il est notamment l'auteur d'un livre de souvenirs, de plusieurs contributions dans le numéro 13-14 des Cahiers Léon Blum consacré à la Fédération de Tunisie de la SFIO, d'articles dans La Revue socialiste et dans la revue Maghreb-Machrek de La Documentation française, et d'un chapitre dans l'ouvrage collectif Judaïsme d'Afrique du Nord aux XIXe – XXe siècles publié par l'Institut Ben-Zvi en 1980.

Notes et références

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  1. Cohen-Hadria, p. 69.
  2. « Élie Cohen-Hadria », sur maitron.fr (consulté le ).
  3. [En métropole, le parti] « ne portait pas grand intérêt, sauf dans les motions de congrès, aux problèmes coloniaux. Une fois le paragraphe adéquat voté par acclamation, on laissait les militants locaux faire une besogne dont la plupart des congressistes ignoraient la portée et les difficultés » écrit Charles-André Julien dans sa préface à Cohen-Hadria, p. viii.
  4. Tunis socialiste ouvre à plusieurs reprises ses colonnes en tribune libre — la rubrique est intitulée « Droit d'asile » — à ces militants quand la censure française les empêche de s'exprimer ailleurs : Aline Naura, « Les socialistes de Tunisie devant la crise de 1929 et ses conséquences politiques », Le Mouvement social, no 78,‎ , p. 65-93 (ISSN 0027-2671, lire en ligne).
  5. Cohen-Hadria, p. 156.
  6. De fait, une quinzaine d'arrestations politiques ont lieu en février 1943 : des hommes de gauche, des suspects de gaullisme, et même un pétainiste insuffisamment enclin à la collaboration. Victor, frère aîné d'Élie Cohen-Hadria, fait partie des sympathisants socialistes arrêtés. Trois Juifs de cette vague d'arrestations ne reviendront jamais : l'un meurt en chemin (docteur Goldzeiger), les deux autres en déportation en Allemagne (Victor Cohen-Hadria et Benjamin Lévy) selon Cohen-Hadria, p. 165-166.
  7. Cohen-Hadria, p. 172-174.
  8. Cohen-Hadria, p. 221.
  9. Voir la motion du 11 décembre 1949 de la Fédération socialiste de Tunisie dans Blum 1983, p. 95.
  10. Savary 1987.
  11. Carmi 2009.
  12. Cohen-Hadria, p. 301.
  13. Mayer 1987.

Bibliographie

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Liens externes

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