En chimie physique, et plus particulièrement en thermodynamique, l'activité chimique, ou activité, d'une espèce chimique exprime l'écart entre les propriétés de cette espèce pure ou dans un mélange réel et les propriétés de cette même espèce dans un état standard à la même température. La notion d'activité chimique est surtout employée pour les phases liquide et solide. Elle permet notamment le calcul des équilibres de phases et des équilibres chimiques.
De nombreux modèles de coefficients d'activité ont été développés pour les phases liquides, avec comme état standard les liquides purs. Les grandeurs d'excès, calculées à partir des coefficients d'activité, expriment l'écart entre les grandeurs extensives d'un mélange réel et celles d'une solution idéale.
À la suite de l'apparition de l'équation d'état de van der Waals en 1873, il devenait possible de calculer les équilibres de phases gaz-liquide. En effet, cette équation novatrice pour son époque permettait de calculer aussi bien les propriétés d'un gaz que celles d'un liquide. Willard Gibbs et Pierre Duhem introduisirent peu après (1875 à 1878) le potentiel chimique, important dans les équilibres de phases et les équilibres chimiques. Toutefois, le potentiel chimique se révéla difficile à manipuler, car il ne peut être calculé qu'à une constante additive près et non de façon absolue, de plus le potentiel chimique de toute espèce tend vers l'infini négatif à dilution infinie. En 1900[1] et 1901[2], Gilbert Lewis introduisit la fugacité, qui décrit l'écart de comportement d'un corps réel, pur ou en mélange, par rapport au même corps à l'état de gaz parfait pur. Cette notion se révéla efficace dans son application pour les gaz, mais les équations d'état représentant assez mal les phases liquides, Lewis introduisit en 1923[3] l'activité chimique, plus spécialement appliquée aux phases condensées (liquide ou solide). L'activité chimique est surtout utilisée dans l'expression des vitesses de réaction et des constantes d'équilibre dans l'étude des réactions et équilibres chimiques, et dans le calcul des coefficients de partage dans l'étude des équilibres de phases.
La fugacité d'un corps a été définie par Lewis par la variation isotherme du potentiel chimique de ce corps :
En intégrant cette relation à température constante, on obtient la relation entre les potentiels chimiques et d'un corps dans deux états différents 1 et 2 :
et étant les fugacités dans les états respectifs. Ces deux états peuvent être :
à des pressions différentes : et ;
de compositions différentes : et , avec la fraction molaire de l'espèce dans l'état ; par ex. :
l'état 1 peut être le corps pur () ;
l'état 2 un mélange contenant le corps () ;
dans des phases différentes : par ex. gaz parfait pour l'état 1 et liquide pour l'état 2.
Néanmoins, les deux états sont à la même température :
Note sur la fugacité et l'état standard gaz parfait pur.
La fugacité est définie par rapport à l'état standard gaz parfait pur. La relation ci-dessus est tout à fait compatible avec cette définition. En effet, on a les relations suivantes entre potentiels chimiques du même corps dans divers états, à la même température :
pour le passage isotherme du gaz parfait pur dans les conditions de pression et température à l'état 1 dans les mêmes conditions ;
pour le changement de pression isotherme d'un gaz parfait pur ;
pour le passage isotherme du gaz parfait pur dans les conditions de pression et température à l'état 2 dans les mêmes conditions.
On a donc la relation :
Dans la pratique, l'état 2 est l'état réel du mélange et l'état 1 un état standard dans lequel il est facile de calculer les propriétés du corps à la même température que l'état réel. On note alors :
Lorsque, pour le calcul des propriétés d'un mélange réel, l'état standard de chaque corps est pris comme étant le corps pur aux mêmes pression , température et dans la même phase (gaz, liquide ou solide) que le mélange réel, les potentiels chimiques réel (fugacité ) et du corps pur (fugacité ) sont liés par la relation :
Par définition, le potentiel chimique du corps dans une solution idéale et le potentiel chimique du corps pur, tous deux définis aux mêmes pression et température , et pour la même phase, sont liés par la relation :
On peut alors écrire, en considérant une solution idéale aux mêmes pression, température et composition, et dans la même phase (gaz, liquide ou solide) que le mélange réel :
avec la fugacité en solution idéale. Le rapport entre la fugacité réelle et la fugacité en solution idéale est appelé coefficient d'activité, il est noté :
Le coefficient d'activité exprime l'écart entre le potentiel chimique d'un corps dans un mélange réel et le potentiel chimique de ce corps dans la solution idéale aux mêmes pression , température et composition (fractions molaires ), dans la même phase (gaz, liquide ou solide) :
Coefficient d'activité :
Le coefficient d'activité exprime également l'écart entre le potentiel chimique d'un corps dans un mélange réel et le potentiel chimique de ce corps pur dans la même phase, aux mêmes pression et température :
Par définition, le coefficient d'activité d'un corps dans une solution idéale est donc égal à 1 :
Dans une solution idéale : et
À fortiori pour un corps pur :
Pour un corps pur : et
La solution idéale correspond au cas idéal dans lequel les molécules du mélange s'attirent ou se repoussent entre elles, toutes espèces confondues, de la même façon que les molécules de chacun des constituants considéré pur s'attirent ou se repoussent entre elles.
Lorsque les molécules d'un mélange réel s'attirent plus entre elles que dans la solution idéale, les activités de tous les composants sont inférieures aux fractions molaires : dans ce cas et .
Inversement, lorsque les molécules d'un mélange réel se repoussent plus entre elles que dans la solution idéale, les activités de tous les composants sont supérieures aux fractions molaires : dans ce cas et .
Note sur la relation entre coefficient de fugacité et coefficient d'activité
Avec les coefficients de fugacité respectifs du corps dans le mélange réel et du corps pur , nous avons la relation entre coefficient d'activité et coefficients de fugacité :
Pour le calcul d'un équilibre chimique, certaines approximations sont souvent faites dans l'expression de l'activité chimique.
Pour un mélange de gaz parfaits, l'état de référence pris pour chacun des constituants est le constituant pur à l'état de gaz parfait à la même température que le mélange, mais à la pression , prise égale à 1, exprimée dans la même unité que la pression : bar, Pa, atm, mmHg, etc. Il est important de vérifier dans toute littérature donnant une constante d'équilibre l'unité dans laquelle les pressions partielles sont exprimées. Si l'unité conseillée est le bar, et donc = 1 bar, cette convention est loin d'être utilisée systématiquement.
L'expression de l'activité :
est alors réduite à la pression partielle du corps dans le mélange :
Rappelons que l'activité n'a pas de dimension, le fait de ne pas noter n'est qu'une simplification d'écriture.
Un solvant, dont la concentration est largement supérieure à celle des solutés, peut être assimilé à un corps pur et son activité est prise égale à 1 (par exemple l'eau dans une réaction d'oxydoréduction ou une réaction acido-basique en phase aqueuse).
Lorsque la concentration ou molarité d'un soluté est faible, son activité est prise égale au rapport de sa concentration sur une concentration de référence prise égale à 1, exprimée dans la même unité que la concentration réelle : par ex. mol.l−1. L'expression de l'activité :
est alors réduite à la concentration du corps dans le mélange :
L'activité peut également être exprimée à partir de la molalité avec une molalité de référence de 1 exprimée dans la même unité : par ex. mol.kg−1. L'expression de l'activité :
est alors réduite à la molalité du corps dans le mélange :
Contrairement au potentiel chimique qui n'est toujours défini qu'à une constante additive près, le coefficient d'activité, et l'activité, peut être calculé de façon absolue, ce qui le rend particulièrement intéressant dans le calcul des propriétés des mélanges réels.
Les modèles d'activité sont surtout utilisés dans le calcul des équilibres de phases.
De nombreux modèles de coefficients d'activité pour les phases liquides ont été développés, avec comme état standard les corps liquides purs :
Hormis les modèles de Margules et Van Laar, formes totalement empiriques à régresser sur des résultats expérimentaux, les autres modèles sont basés sur des théories d'interaction entre les divers corps du mélange et peuvent également être ajustés sur des résultats expérimentaux.
Lorsque deux phases ou plus (gaz, liquide, solide) sont en équilibre, les potentiels chimiques de chacun des corps en présence sont homogènes sur l'ensemble des phases. Autrement dit, s'il existe à l'équilibre les phases , les potentiels chimiques de tout corps présent répondent à l'égalité :
Équilibre chimique :
Cette égalité est équivalente à celle des fugacités du corps dans les différentes phases : .
Nous supposerons par la suite un équilibre entre une phase vapeur et une phase liquide, en introduisant les fractions molaires respectives de chacun des corps .
Pour la phase vapeur, l'approche par coefficient de fugacité est préférée car il existe de nombreuses équations d'état pouvant la représenter correctement. L'état de référence pour le calcul du potentiel chimique est le gaz parfait pur aux mêmes pression et température que le mélange réel. On a alors, en introduisant le coefficient de fugacité en phase vapeur, l'expression de la fugacité en phase vapeur :
Fugacité en phase vapeur :
Pour la phase liquide, l'approche par coefficient d'activité est préférable à l'approche par coefficient de fugacité car il existe de nombreux modèles d'enthalpie libre d'excès qui la représentent bien mieux que les équations d'état. L'état de référence pour le calcul du potentiel chimique est le corps pur liquide aux mêmes pression et température que le mélange réel. On a alors, en introduisant le coefficient d'activité en phase liquide et la fugacité du corps pur en phase liquide, l'expression de la fugacité en phase liquide :
Fugacité en phase liquide :
Note sur l'état standard de la phase liquide.
Pour la phase liquide, l'état standard choisi est celui du liquide pur. Ceci n'est pas incompatible avec la définition de la fugacité par rapport à l'état de gaz parfait pur. En effet, pour un même corps , on a les relations successives des potentiels chimiques dans divers états aux mêmes et :
pour le passage du gaz parfait pur au liquide pur ;
pour le passage du liquide pur à la solution liquide idéale ;
pour le passage de la solution liquide idéale à la solution liquide réelle.
On a donc bien la relation liant le potentiel chimique du corps dans la solution liquide réelle à celui du même corps à l'état de gaz parfait pur aux mêmes et :
L'égalité des fugacités à l'équilibre des phases induit l'expression de l'approche (gamma-phi) :
Approche :
On déduit également de cette expression le coefficient de partage du corps entre les deux phases, noté :
Coefficient de partage :
Cette approche par états de référence différents pour les deux phases est appelée « approche » (gamma-phi). L'approche par coefficient de fugacité employé pour les deux phases est appelée « approche » (phi-phi). Dans cette approche ; on a donc : .
L'approche nécessite deux modèles distincts : une équation d'état pour la phase vapeur et un modèle de coefficient d'activité pour la phase liquide ; elle est recommandée pour des pressions inférieures à 10 bar. Au-delà, l'approche est recommandée car elle ne nécessite qu'une seule et même équation d'état pour représenter les deux phases, ce qui rend le calcul cohérent à l'approche du point critique où les deux phases doivent se rejoindre. Les deux modèles de l'approche posent des problèmes de convergence numérique autour du point critique.
En ce qui concerne l'état standard, le corps pur à la même température que le mélange réel n'existe pas toujours à l'état liquide, aussi faut-il discerner deux cas de figure :
le corps existe à l'état liquide pur à la température du mélange, c'est-à-dire qu'il existe une pression de vapeur saturante du corps pur à : la fugacité est calculée selon la « convention symétrique » ;
le corps est supercritique à la température du mélange, c'est-à-dire qu'il n'existe pas de pression de vapeur saturante du corps pur à car la température critique du corps : la fugacité (fictive) est calculée selon la « convention dissymétrique », le corps est alors un gaz dissout.
Lorsque tous les constituants de la phase liquide existent à l'état liquide à la température du mélange (c'est-à-dire que la température du mélange la température critique du corps , pour chacun des constituants), l'état de référence liquide pur est donc réel pour chacun des corps . La fugacité de tous les corps dans cet état est alors établie comme suit. Cette convention étant applicable à tous les constituants du mélange, elle est appelée « convention symétrique ».
Démonstration.
On considère d'abord le liquide pur à la température du mélange. La variation isotherme du potentiel chimique d'un corps pur en phase liquide en fonction de la pression est donnée par la relation :
En intégrant l'expression ci-dessus entre et la pression du mélange, on obtient :
Nous notons la correction de Poynting :
(1)
On considère ensuite le corps pur à saturation à la température , la pression est alors égale à la pression de vapeur saturante correspondante. On introduit le potentiel chimique du corps pur à l'état de gaz parfait, les expressions du potentiel chimique et du coefficient de fugacité du corps pur (soit les fractions molaires respectives en phases vapeur et liquide) à saturation pour chacune des deux phases :
Puisque, par définition, à saturation le corps liquide pur est en équilibre avec sa vapeur, le potentiel chimique du liquide pur est égal à celui du gaz pur :
nous pouvons établir les égalités :
(2)
Note : bien que les coefficients de fugacité à saturation des deux phases soient en théorie égaux, il est préférable de conserver le coefficient de fugacité de la phase vapeur dans l'expression des potentiels de la phase liquide. En pratique en effet les équations d'état représentent mieux les phases gaz que les phases liquides, aussi vaut-il mieux, pour la précision du résultat, calculer un coefficient de fugacité d'une phase vapeur que d'une phase liquide.
Enfin, en considérant la variation du potentiel chimique d'un gaz parfait pur en fonction de la pression à température constante :
le coefficient de fugacité du corps en phase vapeur, à , et composition du mélange gazeux ;
le coefficient de fugacité du corps pur à saturation en phase vapeur, à et ;
le coefficient d'activité du corps en phase liquide, à , et composition du mélange liquide ;
le volume molaire liquide du corps pur à ;
la correction de Poynting.
Les liquides étant peu compressibles, nous pouvons supposer que le volume molaire du liquide pur ne dépend que de la température, aussi obtient-on :
Pour des pressions de l'ordre de grandeur de la pression atmosphérique, la correction de Poynting est négligeable : . Si l'on considère la phase vapeur comme un mélange de gaz parfaits, alors et . De même, si l'on considère la phase liquide comme une solution idéale, alors . On obtient la loi de Raoult :
Lorsqu'un constituant dans la phase liquide est supercritique (c'est-à-dire que la température du mélange la température critique du constituant ), le corps est un gaz dissout dans un solvant liquide. L'état de référence liquide pur du constituant est alors fictif : on se base par conséquent sur un autre état de référence, celui du corps infiniment dilué dans le solvant aux mêmes et .
Pour les autres corps tels que , ces corps sont considérés comme des solvants et on leur applique la référence liquide pur de la convention symétrique.
Tous les corps dans le mélange liquide n'étant pas représentés de la même façon, puisque l'on distingue les gaz dissouts des solvants, cette convention est appelée convention dissymétrique.
Avant de développer le formalisme mathématique de la convention dissymétrique, il est nécessaire de définir la constante de Henry.
Soit la fugacité du corps à dilution infinie dans un solvant :
À dilution infinie d'un corps dans un solvant , le potentiel chimique de est infiniment négatif :
la fugacité à dilution infinie ne peut donc être que nulle :
Si l'on considère que, pour des fractions molaires de proches de 0, la fugacité se comporte idéalement de façon linéaire, telle que :
bien que et , en vertu de la règle de L'Hôpital on définit la constante de Henry par la limite :
Constante de Henry :
La constante de Henry, comme la fugacité, a la dimension d'une pression.
La constante de Henry n'est pas la fugacité du corps à dilution infinie : . Comme vu plus haut celle-ci est nulle : .
La constante de Henry dépend du solvant dans lequel le corps est dissout, ce solvant pouvant être aussi bien un corps pur qu'un mélange.
En considérant la solution du corps gazeux dissout dans le solvant liquide comme une solution idéale, on écrit :
avec le potentiel chimique du corps en solution idéale dans le solvant . Les potentiels chimiques de la relation précédente sont définis aux mêmes et .
La constante de Henry est déterminée expérimentalement en fonction d'une pression de référence et de la température . La pression de référence est souvent prise égale à la pression de vapeur saturante du solvant , , à donnée ; dans ce cas, la pression de référence varie avec la température. La pression de référence peut également être fixe (le plus souvent 1 atm).
La constante de Henry peut être calculée à une autre pression , à la même température , selon la relation :
avec le volume molaire partiel du corps infiniment dilué dans le solvant . Cette grandeur, non nulle, est déterminée expérimentalement par extrapolation du volume molaire partiel du corps dans le mélange liquide :
Nous notons la correction de Poynting :
D'où l'évolution de la constante de Henry entre deux pressions :
Variation de la constante de Henry avec la pression :
En supposant que le volume molaire ne dépend pas de la pression, cette relation devient l'équation de Krichevsky–Kasarnovsky :
L'état de référence considéré est celui du corps infiniment dilué dans le solvant . Nous introduisons le coefficient d'activité du corps en solution dans le solvant à et dans la convention dissymétrique, correspondant à l'écart entre le potentiel chimique du corps dans le mélange liquide réel et le potentiel chimique du corps en solution idéale dans le solvant .
Pour un corps dans la convention dissymétrique, la fugacité en phase liquide s'écrit :
(a)
(b)
Dans cette convention, par définition de la constante de Henry :
le passage à la limite de la dilution infinie de la relation (b) donne :
(c)
Pour un corps dans la convention symétrique, la fugacité en phase liquide s'écrit :
(d)
(e)
Dans cette convention, par définition de la fugacité du corps pur en phase liquide :
le passage à la limite du corps pur de la relation (e) donne :
(f)
Les limites (c) et (f) différentes sont dues aux états de référence différents. Les modèles de coefficients d'activité exposés au paragraphe calcul du coefficient d'activité sont développés pour l'état standard corps liquide pur et . Néanmoins, ils sont également utilisés pour calculer le coefficient d'activité comme démontré plus bas.
L'égalité des expressions (b) et (e) de la fugacité en phase liquide donne :
(g)
Pour un gaz dissout, la fugacité à l'état de liquide pur est purement fictive.
En passant l'égalité (g) à la limite de la dilution infinie :
car définie à et définie à ne dépendent pas de .
En introduisant le coefficient d'activité du corps à dilution infinie défini par :
En introduisant cette relation (h) dans l'égalité (g), on obtient finalement :
(i)
Les coefficients d'activité et sont calculés au moyen des modèles classiques exposés au paragraphe calcul du coefficient d'activité, il n'y a donc pas besoin de développer des modèles spécifiques de coefficient d'activité pour la convention dissymétrique et . On vérifie en effet la relation (c) :
De plus, avec les relations (a), (d) et (i), nous avons :
Le coefficient d'activité à dilution infinie représente donc l'écart entre les deux solutions idéales de référence.
le coefficient de fugacité du corps en phase vapeur, à , et composition du mélange gazeux ;
le coefficient d'activité du corps en phase liquide, à , et composition du mélange liquide ;
le coefficient d'activité du corps en phase liquide, à , et dilution infinie dans le solvant ;
le volume molaire partiel du corps en phase liquide, à , et dilution infinie dans le solvant ;
la correction de Poynting.
Les liquides étant peu compressibles, nous supposons que le volume molaire ne dépend que de la température, aussi obtient-on :
Pour des pressions de l'ordre de grandeur de la pression atmosphérique, la correction de Poynting est négligeable : . Si l'on considère la phase vapeur comme un mélange de gaz parfaits, alors . De même, si l'on considère la phase liquide comme une solution idéale, alors . On obtient la loi de Henry :
Une grandeur d'excès exprime l'écart entre une grandeur thermodynamique extensive d'un mélange liquide réel et la même grandeur thermodynamique extensive d'un mélange liquide idéal aux mêmes pression, température et composition :
Grandeur d'excès :
Une grandeur d'excès est par construction également une grandeur extensive, il est donc possible de définir une grandeur molaire d'excès pour le mélange et une grandeur molaire partielle d'excès pour chacun des corps présents dans le mélange. Les relations suivantes sont également vraies :
Grandeur molaire d'excès :
Grandeur molaire partielle d'excès :
avec, toutes ces grandeurs étant définies aux mêmes pression, température et composition :
la grandeur molaire partielle du corps dans le mélange réel ;
la grandeur molaire d'excès du mélange ;
la grandeur molaire partielle d'excès du corps ;
la grandeur molaire du mélange liquide idéal ;
la grandeur molaire partielle du corps dans le mélange liquide idéal.
Note : la même démarche est en théorie applicable à toutes les phases, gaz, liquide ou solide. Néanmoins, elle est surtout employée pour les phases condensées liquide et solide. Dans ce dernier cas il faut bien entendu considérer une solution idéale solide, constituée à partir des solides purs, et dans ce qui suit un modèle de coefficient d'activité spécifique aux solides.
L'enthalpie libre d'excès a donc une importance particulière dans le calcul des propriétés des phases condensées :
Enthalpie libre d'excès :
Enthalpie libre molaire d'excès :
Note sur la dépendance de à la pression
Si on mélange 1 litre d'eau avec 1 litre d'éthanol, on obtient un volume total d'environ 1,92 litre[4]. Le volume idéal est de 1 litre + 1 litre = 2 litres et le volume d'excès est de 1,92 litre - 2 litres = −0,08 litre, il y a contraction du volume. Le mélange eau-éthanol n'est donc pas une solution idéale, il présente d'ailleurs un azéotrope que la loi de Raoult ne peut pas représenter.
Dans les phases condensées, le volume d'excès est souvent négligeable et négligé devant le volume de la solution idéale . En pratique, aucun des modèles de coefficient d'activité (ou d'enthalpie libre molaire d'excès ) listés au paragraphe Calcul du coefficient d'activité ne dépend de , et est souvent considéré comme nul.
Les grandeurs extensives du mélange liquide idéal peuvent être calculées facilement à l'aide des propriétés des corps liquides purs si l'on considère une solution idéale aux mêmes pression, température et composition que le mélange réel.
Les grandeurs extensives du mélange liquide réel se calculent donc en appliquant la définition des grandeurs d'excès :
Propriétés d'un mélange liquide réel :
Ceci est appliqué surtout dans le calcul des propriétés des phases condensées, liquide ou solide (pour peu que l'on dispose d'un modèle de coefficients d'activité des solides). Pour les gaz, la solution idéale choisie est le mélange de gaz parfaits aux mêmes pression, température et composition que le mélange réel, et les propriétés sont calculées à l'aide d'une équation d'état et de grandeurs résiduelles.
↑(en) Gilbert Newton Lewis, « A New Conception of Thermal Pressure and a Theory of Solutions », Proceedings of the American Academy of Arts and Sciences, vol. 36, no 9, , p. 145-168 (DOI10.2307/20020988).
↑(en) Gilbert Newton Lewis, « The Law of Physico-Chemical Change », Proceedings of the American Academy of Arts and Sciences, vol. 37, no 3, , p. 49–69 (DOI10.2307/20021635).
↑(en) Gilbert Newton Lewis et Merle Randall, Thermodynamics and the free energy of chemical substances, McGraw-Hill Book Company Inc., .
E. Darmois, « La thermodynamique des solutions », J. Phys. Radium, vol. 4, no 7, , p. 129-142 (lire en ligne, consulté le ).
Ouvrages
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Christophe Coquelet et Dominique Richon, Propriétés thermodynamiques : Détermination pour les mélanges, vol. BE 8 031, Techniques de l'ingénieur, , 12 p. (lire en ligne), p. 6.
Jean-Pierre Corriou, Thermodynamique chimique : Définitions et relations fondamentales, vol. J 1025, Techniques de l'ingénieur, coll. « base documentaire : Thermodynamique et cinétique chimique, pack Opérations unitaires. Génie de la réaction chimique, univers Procédés chimie - bio - agro », (lire en ligne), p. 1-19.
Jean-Pierre Corriou, Thermodynamique chimique : Diagrammes thermodynamiques, vol. J 1026, Techniques de l'ingénieur, coll. « base documentaire Thermodynamique et cinétique chimique, pack Opérations unitaires. Génie de la réaction chimique, univers Procédés chimie - bio - agro », , p. 1-30.
(en) Robert C. Reid, John M. Prausnitz et Bruce E. Poling, The properties of gases and liquids, New York, McGraw-Hill, , 4e éd., 741 p. (ISBN978-0-07-051799-8).